Les coeurs impuissants by Hanotel

Les coeurs impuissants by Hanotel

Auteur:Hanotel
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Archipel
Publié: 2013-10-15T00:00:00+00:00


Gabrielle ne reçut que trois jours plus tard le mot lui annonçant que son mari ne la rejoindrait pas en fin de semaine. Il lui fallait remettre de l’ordre à Grand Banian. Ses phrases raides et ses « tendres baisers » auraient pu s’adresser à n’importe quel membre de la famille. Si elle avait été de mauvaise humeur, elle en aurait conclu qu’il la traitait avec indifférence et ne la méritait pas, mais elle était d’excellente humeur. Elle avait réussi à sauver quatre de ses malades, et presque toutes les graines avaient germé au stade « point blanc ». C’est-à-dire qu’on pouvait maintenant les transplanter en plein champ. Ils allaient devoir travailler sans relâche. Piquer, sarcler, irriguer le petit terrain gagné sur le bois de Max. Elle adorait ça, travailler. L’épuisement physique lui procurait une forme de paix. Quand sa tête tournait, le repas à peine avalé, Arnaud la suppliait d’aller se coucher.

— Sinon, je vais croire que je suis devenu l’homme le plus ennuyeux de la terre. Jamais personne ne s’est encore endormi pendant que je lui parlais. C’est affreux ce que vous me faites ! plaisantait-il.

— Je pourrais vous écouter pendant des heures, protestait-elle en déguisant mal son envie de bâiller.

— Oui, comme un bébé bercé par une voix familière. Bonne nuit, ma chère. Faites de doux rêves.

Elle rejoignait Chuong, déjà endormi à côté d’Amiral. Le chien remuait la queue en la voyant mais ne bougeait pas jusqu’à ce qu’elle soit au lit. Elle s’attardait à sa toilette, goûtait la fraîcheur relative de la nuit, se disait qu’elle n’avait plus sommeil, prenait un recueil de poèmes prêté par Arnaud, piquait du nez à la deuxième ligne, toujours la même, et avait tout juste la force d’éteindre sa lampe à pétrole. C’est à ce moment-là qu’Amiral la rejoignait. Trop gros désormais pour partager son lit, il se glissait dessous et passait la nuit à mâchonner. « Il va encore m’empêcher de dormir », se lamentait-elle avant de sombrer.

Un coup discret frappé à sa porte la tira de ses songes embrouillés. Elle n’eut pas le cœur de réveiller Chuong afin de l’envoyer voir ce qui se passait. « Encore une dispute de coolies », se persuada-t-elle, trop fatiguée pour se lever.

— C’est Arnaud. Vous êtes visible ?

Elle n’eut que le temps d’enfiler son peignoir, il faisait coulisser la paroi.

— Pardonnez-moi de vous déranger si tôt, j’ai bien peur d’avoir une mauvaise nouvelle. Des animaux ont déterré les graines pendant la nuit, probablement des sangliers.

— Combien ? s’affola-t-elle.

Il remarqua les pieds menus cherchant leurs pantoufles. Il n’avait rien vu de tout ça lorsqu’elle s’était fait une entorse. Il aimait beaucoup les pieds féminins, un goût qu’il attribuait à ses lointaines origines chinoises.

— Combien de quoi ? demanda-t-il, distrait. Oh ! à peu près un quart ou un tiers des graines. Je n’ai pas encore fait de bilan précis. Je suis venu récupérer mon carnet, et j’ai pensé que vous aimeriez être informée tout de suite.

Elle se laissa retomber sur son lit, surprise de se sentir abattue par la nouvelle.



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